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Une ministre communiste au Chili, une première depuis 40 ans : un symbole fort !

janvier 2014, par Saint Martin d’Hères

La nouvelle présidente de centre-gauche du Chili vient d’annoncer son nouveau gouvernement. Dans celui-ci, pour la première fois depuis 1973, une ministre communiste. Au-delà de ses conséquences pratiques incertaines, le symbole est fort.

Un mois après sa large victoire lors des élections présidentielles, Michelle Bachelet a dévoilé son nouveau gouvernement issu de son alliance « Nueva mayoria » (Nouvelle majorité) – regroupant Parti socialiste, Parti démocrate-chrétien et Parti communiste.

Parmi les 23 nouveaux ministres, une sera communiste : Claudia Pascual, anthropologue de formation, ancienne conseillère municipale de Santiago. Elle intègre le gouvernement en tant que Ministre de la Femme.

La dernière fois que les communistes ont accédé au gouvernement, c’était lors de l’expérience de l’ « Union patriotique » menée par Salvador Allende. Le rêve (les hispanophones disent ilusion) d’un « socialisme démocratique » noyé dans le sang du coup d’Etat de Pinochet du 11 septembre 1973.

La nouvelle ministre a annoncé son intention d’avancer vers la légalisation de l’avortement au Chili, mais aussi de faire progresser l’égalité hommes-femmes dans tous les secteurs de la société, notamment dans le monde du travail.

Le Parti communiste (PCCh) avait déjà remporté un succès historique lors des élections législatives de novembre, avec 4,2 % des voix, obtenant 6 députés (deux fois plus qu’en 2009) dont les jeunes leaders du mouvement étudiant Karol Cariola et Camila Vallejo.

Si le Parti communiste entame son retour dans les institutions, c’est désormais les acteurs du mouvement social qui le questionnent et lui demandent de ne pas perdre sa raison d’être.

Grève dans les ports, impatience des étudiants, revendication des mineurs : que le Parti communiste ne perde pas sa raison d’être

En effet, les promesses de Michelle Bachelet laissent aussi sceptiques les couches les plus combatives du mouvement ouvrier et étudiant chilien.

Que les communistes soient désormais à la tête de la centrale syndicale unitaire (CUT), sous la direction de l’enseignante encartée au PCCh Barbara Figueroa éveille espoirs et doutes.

Les dockers chiliens se sont ainsi lancés en ce début d’année dans une grève historique, à partir de deux ports (San Antonio et Mejillones), étendue ensuite à 9 ports, paralysant l’exportation de cuivre et de produits agricoles, suscitant solidarité de la part des mineurs et des étudiants chiliens.

La CUT a été d’une discrétion quasi-totale, selon sa secrétaire « parce que les dockers n’ont pas fait appel à la CUT ». Étrange déclaration de la part de la dirigeante de la centrale syndicale unitaire, n’est-ce pas son rôle même, de faire le lien, créer la convergence des luttes ?

La dirigeante de la CUT dut elle-même reconnaître qu’elle « ne sait pas si le programme de Michelle Bachelet est réellement une avancée pour le monde du travail ». C’est déjà une réponse.

D’autres secteurs attendent avec impatience les premiers actes du gouvernement, comme le mouvement étudiant.

Les étudiants se souviennent de la première expérience de Bachelet en 2005 qui avait conduit au renforcement de la privatisation de l’éducation, la hausse des frais de scolarité et à une grève étudiante massive, appelée « Révolution des pingouins » (référence à l’uniforme des étudiants).

Les dirigeants des deux principaux syndicats étudiants, la FECh et la FEUC, ont promis qu’ils relanceraient la lutte à la fin des vacances d’été, espérant conquérir par la lutte une éducation 100 % publique et gratuite.

Les mineurs promettent également de repartir au combat pour la re-nationalisation du cuivre, une mesure soutenue par 85 % de la population chilienne.

Que va faire le Parti communiste dans ce contexte ? Confronté aux questions sans concessions des journalistes, en conférence de presse, Guillermo Tellier, secrétaire-général du PCCh, a répondu, laissant encore une certaine zone d’ombre.

Tellier défend la re-nationalisation du cuivre, une éducation 100 % publique, une réforme démocratique de la Constitution héritée de la dictature, une réforme fiscale progressive et promet de le faire « un pied dans les institutions, un pied dans les luttes » :

« Les communistes seront dans les mobilisations sociales, les marches syndicales, dans les actes de soutien au programme de gouvernement. Les communistes soutiendront les demandes du mouvement étudiant, des professeurs (…)

Mais c’est un processus. Le rapport de forces ne permet pas un changement radical en peu de temps (…) Il n’y a pas de dichotomie entre être au gouvernement et dans le mouvement social, c’est complémentaire, même si il y aura des contradictions.

Si il y a le rapport de forces, les conditions réelles, objectives, un chemin pour réaliser les revendications du mouvement étudiant, alors il faut les faire avancer. Nous entrons au gouvernement pour faire passer la réforme de l’éducation, pas pour faire les pompiers de service. »

Les propos du dirigeant du Parti communiste chilien ne dissipent pas tous les doutes, surtout si Bachelet ne tient pas ses promesses. Seul l’avenir nous dira l’évolution des contradictions, Mais sur le plan symbolique, le retour des communistes à la tête du Chili est à saluer !