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Travailleurs saignés et services publics démantelés : Face au plan d’austérité, les syndicats tchèques appellent à la grève pour le 8 décembre tandis que les communistes prouvent leur raison d’être

novembre 2010, par Saint Martin d’Hères

Avec une récession de 4,1% et un déficit public de 5,9% en 2009, l’ancienne locomotive industrielle du bloc de l’Est est plongé dans une crise profonde vingt ans après la « contre-révolution de velours » qui a restauré en ex-Tchécoslovaquie un système capitaliste libéral mis en place par l’ODS de Vaclav Havel et Vaclav Klaus.

Dans le cadre du modèle libéral tchèque, avec une politique valorisant « l’offre » (cad le capital) sur la « demande intérieure » (cad les travailleurs) et une économie extrêmement dépendante des investissements étrangers et des exportations d’équipements industriels et de produits finis, la crise du capitalisme mondial ne pouvait que le toucher durement.

Et surtout faire payer la facture aux travailleurs eux-mêmes, en particulier du privé. Les plans sociaux et fermetures d’usines se multiplient, comme chez le constructeur de camions Tatra qui a licencié 500 de ses 2 500 ouvriers cette année ou encore à la Société de gestion des chemins de fer qui a supprimé près de 1 000 emplois cette année. L’industrie automobile tchèque seule a supprimé 12 000 emplois en 2009.

La conséquence logique en est la hausse spectaculaire du taux de chômage, passant de 4 à près de 10% en un an, ainsi que la réduction générale des salaires réels mais aussi nominaux.

Un plan d’austérité qui fait payer la crise par les travailleurs et privatise les services publics hérités du système socialiste

Et le plan d’austérité proposé par le gouvernement de droite et adopté ce mardi 2 octobre par le Parlement va aggraver le fardeau pesant sur les épaules des travailleurs tchèques : hausse des impôts forfaitaires, socialement les plus injustes (imposition à 50% de l’épargne-logement, impôt exceptionnel de 4 euros par tête) ; diminution et restriction de l’accès aux allocations sociales et familiales ; baisse des salaires des fonctionnaires de 10 à 43%.

Mais ces mesures qui frapperont durement les travailleurs s’articulent à l’attaque principale du gouvernement de droite porté contre les restes de l’État social et des services publics hérités de l’époque socialiste. Le gouvernement prévoit la fin de l’éducation gratuite avec l’instauration de frais de scolarité, la casse du système de retraites assurantiel actuel et sa privatisation avec un système à trois étages, avec capitalisation et maintien d’un filet de sécurité assistantiel et enfin la casse définitive de la Santé publique tchèque.

Le gouvernement tchèque prévoit d’attribuer 400 millions d’euros en moins au secteur de la santé pour 2011. Les conséquences directes, ce sont les déremboursements de visites médicales et de médicaments vont s’intensifier ainsi que la hausse des forfaits hospitaliers avec parfois des conséquences dramatiques. La conséquence indirecte, c’est le développement d’une santé privée accessible uniquement aux plus riches et la généralisation des pratiques de corruption.

Autre conséquence, la baisse attendue de la rémunération des médecins et des infirmiers qui laissent présager un exode massif des médecins tchèques vers les voisins allemands et autrichiens. En 2009, 250 médecins tchèques avaient déjà choisi l’exil, alors qu’il y aurait un manque de 700 médecins chaque année dans le pays.

Les syndicats comptent sur un potentiel de mobilisation inédit pour faire plier le gouvernement

Pour les Tchèques, trop c’est trop. Car avec la hausse des loyers et les crédits à rembourser, nombre de ménages sont au bord de la faillite personnelle. Chiffre qui illustre l’ampleur du désastre social : en 2009, le nombre de faillites personnelles a augmenté de 250%. Quand dans le même temps, le gouvernement de droite trouve de l’argent pour renforcer le contingent militaire en Afghanistan de 200 hommes, le caractère spécieux de l’argumentaire de patronat devient manifeste.

1 tchèque sur 5 seulement soutient les mesures d’austérité du gouvernement. C’est sur ce capital-sympathie et, au-delà, sur ce potentiel de mobilisation inédit que les syndicats espèrent construire un mouvement capable de faire plier le gouvernement.

Le 21 septembre dernier, plus de 50 000 travailleurs avait arpenté les rues de Prague pour protester contre la politique de casse sociale du gouvernement. Une des plus grandes manifestations de ces deux dernières décennies, avec l’irruption nouvelle et massive de la jeunesse étudiante.

Les syndicats ont annoncé cette semaine leur volonté d’appeler à une journée de grève dans les prochaines semaines. Le jour a été fixé en début de semaine, ce sera le 8 décembre. Si l’hypothèse de grève illimitée n’a pas encore entérinée par l’intersyndicale, elle a déjà été posée et bénéficie d’une large sympathie dans les bases syndicales.

La droite discréditée, les sociaux-démocrates prêts à négocier : la raison d’être des communistes

Dans ce contexte, les sénatoriales partielles des 16 et 23 octobre étaient un test pour le gouvernement, un « mini-réferendum » sur les contre-réformes proposées. L’impopularité du gouvernement s’est reflétée jusque dans les urnes puisque la droite a perdu 15 des 25 sièges qu’elles mettaient en jeu lors de ce scrutin. Elle perd par là-même la majorité au Sénat qui passe à gauche.

Le grand gagnant du scrutin est indubitablement les sociaux-démocrates, qui remportent 12 sièges directement conquis à la droite et remporte pour un siège (41 sur 81) la majorité au Sénat. Le Parti social-démocrate a su gauchir son discours dans l’opposition, s’opposant tant aux mesures d’austérité qu’au renforcement du contingent en Afghanistan. Toutefois, son accord de fond avec les réformes du gouvernement, patent dans sa pratique gouvernementale antérieure, ne constitue pas une menace pour le projet de loi gouvernemental.

En effet, comme l’affirme explicitement le leader des sociaux-démocrates, Bohuslav Sobotka : « Nous souhaitons que le Sénat présente une alternative, pour que le gouvernement soit obligé de chercher des compromis lors de leur mise en oeuvre ». Non au véto au Sénat, oui à un plan d’austérité négocié, voilà la position des sociaux-démocrates tchèques.

Voilà la raison d’être des communistes tchèques. Eux seuls portent depuis vingt ans la critique conséquente du système capitaliste et des contre-réformes libérales portées souvent par la droite mais consenties par la gauche social-démocrate. Les communistes ont, dans des circonscriptions difficiles et dans une élection qui n’est pas la meilleure pour eux, obtenu encore un bon score de 10,5%.

Au-delà, la désillusion de tant de travailleurs tchèques vis-à-vis du système capitaliste et leur volonté nouvelle de se battre pour s’opposer à cette machine à broyer les travailleurs et les peuples donnent raison à la lutte obstinée du Parti communiste de Bohême-Moravie.

Un des rares partis d’Europe de l’est qui a refusé sa dissolution en 1989-91, et qui vingt ans après prouvent tout le bien-fondé de son choix.

voir le site de nos camarades tchéques :

http://www.kscm.cz/