Parti Communiste Français Section de Saint-Martin d’Hères
Accueil du site > Solidarité internationale > Marcelino Camacho, dirigeant historique, fondateur du syndicat de classe (...)

Marcelino Camacho, dirigeant historique, fondateur du syndicat de classe des Commissions Ouvrières et militant communiste jusqu’à son dernier souffle, vient de disparaitre

octobre 2010, par Saint Martin d’Hères

Le PCE regrette profondément la mort d’un de ses meilleurs communistes, Marcelino Camacho, référence de la lutte pour la liberté, l’égalité et les droits de tous les travailleurs de ce pays, le dirigeant syndical le plus important du XXème siècle, le premier secrétaire-général des Commissions Ouvrières (CC.OO), le député communiste, élu lors de la première législature démocratique de ce pays, qui a finalement renoncé à son siège pour éviter les interférences entre ses responsabilités avec le syndicat et son militantisme.

Ces dernières années, retiré de la vie politique et sociale à cause de sa maladie, Marcelino n’a jamais cessé de lutter pour son parti, le PCE, auquel il a adhéré en 1935 et pour lequel il a passé tant d’années en prison, à tel point que quand il a acheté un appartement, sa femme Joséphine, pragmatique, a décidé que le mieux était de le prendre à Carabanchel, près de la prison où Marcelino a passé tant d’années, et où Josefina avait tous ses repères.

Marcelino Camacho est né le 21 janvier 1918 à Osma la Rosa, dans la province de Soria. Il a grandi dans le village Aragonais de Ariza, où son père était cheminot. Sa mère est morte quand il avait 9 ans. Il avait trois sœurs et deux sont mortes jeunes, une d’elles quand il était en prison, son père aussi est mort quand il était à Carabanchel. Ses deux fils se sont mariés et ses petits-enfants sont nés quand il se trouvait dans les prisons franquistes.

Militant du Parti communiste dès 1935, combattant républicain, interné dans les camps franquistes

En 1935, il adhère au Parti communiste d’Espagne (PCE), un engagement qui l’a emmené à combattre dans le camp républicain. Il a été arrêté après le coup d’Etat qui a mené à la guerre civile et condamné à une peine 12 ans et un jour commuée en 6 ans ferme pour « participation à la rébellion ». Transféré alors au camps de concentration de Reus (Tarragone), il est par la suite interné dans différents camps de travaux forcés. Il tombe malade et passe 42 jours entre la vie et la mort. Il se remet de sa fièvre et retourne à nouveau dans un camp de travail, cette fois à Salamanque. Il est opéré d’une hernie inguinale et attrape alors la Fièvre de Malte. Placé en bataillon disciplinaire, il est transféré à Tanger où il ne se remet toujours pas.

En décembre 1943, il s’échappe du camp de travail et passe au Maroc français. Les français l’arrêtent et le transfèrent à Oran. Là-bas, il fait connaissance de Josefa Samper, Josefina, une jeune militante communiste, qui consacrait une bonne partie de son activité militante à venir en secours des espagnols en fuite et à aider la résistance intérieure. Le 22 décembre 1948, Marcelino et Josefa se marient. Le 18 juillet 1957, avec deux enfants, ils reviennent en Espagne. Vingt-et-un ans après l’insurrection fasciste, Marcelino revient au pays, prêt à continuer la lutte.

Le retour en Espagne sous la dictature : lutte syndicale et politique, procès politique et huit ans de prison

Marcelino Camacho travaille comme ouvrier métallurgique dans l’entreprise Perkins Hispania et se présente au Comité d’entreprise dans le syndicat vertical [syndicats corporatistes seuls autorisés par le régime]. Il s’agissait de profiter de toute possibilité d’organiser la lutte contre le régime et d’améliorer les conditions de vie des travailleurs. En 1964, il organise la Commission ouvrière de la Métallurgie de Madrid, sous le nom de Commission provinciale des délégués et représentants syndicaux. C’est la première Commission Ouvrière de nature permanente, l’origine de ce que nous connaissons aujourd’hui comme la Confédération syndicale des Commissions ouvrières.

Entre 1965 et 1967, il passe plus d’une douzaine de fois dans les bureaux de la Brigade politico-sociale, police chargée de la répression politique. Ils l’arrêtent en juin 1966 au moment où il remet au Ministère du Travail les revendications des travailleurs, avec une lettre signée par 30 000 ouvriers. Et ils l’arrêtent une nouvelle fois en janvier 1967.

Le 1er mars 1967, il est arrêté en compagnie d’autres camarades dirigeants des CC.OO et du PCE et le Tribunal d’Ordre Public l’emprisonne « tant que durera l’état actuel latent de troubles dans les relations de travail ». Ils sont condamnés à vingt ans et incarcérés tout de même pendant neuf ans par la dictature. Le procès dirigé contre lui et ses camarades syndicalistes (Procès 1 001) a été un symbole mondiale de la lutte pour les libertés ; il retrouvait la liberté avec l’amnistie accordé à la mort de Franco.

La fondation des Commissions ouvrières et son élection comme député communiste

En 1976, quand le mouvement des Commissions Ouvrières s’unifie en une confédération syndicale et tient son premier Congrès, Marcelino Camacho est élu premier secrétaire général. A la tête des Commissions ouvrières, il fait de l’organisation la force syndicale majoritaire.

Les premières élections démocratiques de la Transition (1977) lui accordent un siège de député sur la liste du Parti communiste d’Espagne, auquel il renonce deux ans plus tard pour éviter tout conflit entre la discipline de vote du parti et sa fidélité aux intérêts des travailleurs.

En tant que secrétaire-général des Commissions ouvrières il convoque, seul, la première grève générale contre le gouvernement de Felipe Gonzalez, en 1985. Il a également marqué de sa présence les mobilisations contre l’OTAN en 1986 et les mobilisations estudiantines des années 1986-1987.

Sa dernière lutte contre la dérive réformiste des Commissions ouvrières

En 1987, il démissionne de son poste pour raisons de santé et devient alors président du syndicat ; lui succède comme secrétaire-général le jeune Antonio Gutierrez, auquel il s’affrontera quelques années plus tard suite au changement de stratégie du syndicat, avec son éloignement du caractère socio-politique, revendicatif qui avait marqué l’histoire des Commissions ouvrières, une cohérence qu’a conservé Camacho et qui lui coûtera son poste de président du syndicat en 1995.

En 1990, Marcelino Camacho a publié ses mémoires, « J’avoue que j’ai lutté », préfacés par Manuel Vazquez Montalban. Le dirigeant syndical le plus important du XXème siècle en Espagne portait sur sa veste la médaille du Mérite Civil, du Mérite du Travail, de l’Ordre de Lazaro Peña, celle du Conseil d’Etat de Cuba, le Prix León Felipe. Il était doctor honoris causa de l’Université de Valence et de l’Université de Cádiz. Il avait aussi obtenu aussi les prix de la Cohérence, des libertés, etc.

Militant de la cellule de Carabanchel (Madrid), il était jusqu’en 2005 membre du Comité fédéral du PCE, devenant, dès lors, membre honorifique de l’organe suprême de direction du Parti communiste d’Espagne.

Hommages au « dirigeant syndical le plus important du XXème siècle » en Espagne

Le 26 novembre 2007, représentants des partis politiques et des syndicats ont rendu hommage au fondateur des Commissions Ouvrières sous le titre de « Marcelino : histoire d’un engagement ». Marcelino Camacho et, par extension, son inséparable camarade de parcours et de lutte, Josefina, ont reçu pendant plus de deux heures les preuves d’admiration et de gratitude d’un public qui les a reçu debout sous une tonnerre d’applaudissements. Ce sont les Commissions Ouvrières qui ont organisé l’événement public pour le 90ème anniversaire de leur dirigeant historique.

En décembre 2007, la mairie de Malaga a accepté à l’unanimité de renommer une rue du nom du dirigeant des Commissions Ouvrières en hommage et en reconnaissance « de toute une vie de lutte pour la liberté, pour la justice sociale et pour les droits des travailleurs. »

Le 28 mars 2008, un autre hommage lui est rendu à l’Auditorium des Commissions Ouvrières de Madrid, rebaptisé depuis de son nom, avec une énorme affluence ce jour-ci.

Au cours de ces années écoulées depuis 1987, Marcelino n’a cessé de participer à une infinité d’événements et de conférences dans tout l’État jusqu’à ce que son état de santé lui en empêche fin 2008.

Marcelino Camacho, le dirigeant syndical le plus important du XXème siècle en Espagne, sera toujours une référence fondamentale du mouvement ouvrier, du Parti communiste d’Espagne. Marcelino est une des personnalités de l’histoire d’Espagne qui a le plus lutté pour le mouvement ouvrier et la démocratie.

Il a consacré sa vie à la lutte pour ses idéaux et a donné sa vie pour les libertés de ce pays et pour la défense des intérêts des travailleurs.

Adieu Marcelino, à toi camarade Camacho !

Communiqué du Parti communiste d’Espagne.