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600 000 travailleurs dans les rues Chiliennes après deux jours de grève nationale en soutien aux mobilisations étudiantes face à une répression policière meurtrière

août 2011, par Saint Martin d’Hères

Après plus de quatre mois de mobilisations historiques des étudiants chiliens, qui ont porté jusqu’à 500 000 étudiants et enseignants dans la rue, le mouvement ouvrier chilien est passé ces 24 et 25 août de la solidarité en paroles à la solidarité en actes avec deux jours de grève nationale convoquée par la Centrale unitaire des travailleurs (CUT).

Ce 25 août, ils étaient plus de 400 000 travailleurs dans les rues de Santiago, 600 000 dans tout le pays, à exprimer leur solidarité avec les revendications des étudiants et à afficher leur volonté de voir naître un « autre Chili », plus égalitaire que celui hérité de la dictature de Pinochet, laissé intact par la « gauche » et aujourd’hui incarné par le président libéral Sebastian Pinera.

Si le gouvernement a tenté de minimiser l’impact de la grève, le fait est que l’activité du pays a été fortement perturbée, en particulier dans la fonction publique, les transports et l’éducation bien entendu. Les syndicats de fonctionnaires annonçaient des taux de grévistes de 80% dans des branches comme celle des impôts.

Ces deux jours de grève étaient autant une mobilisation de soutien aux étudiants en grève que l’expression d’une colère générale vis-à-vis de la politique de classe du gouvernement Pinera, aujourd’hui plus impopulaire que jamais. Seulement 25% des Chiliens soutiennent le gouvernement.

Le mot d’ordre « Je me bats pour mes enfants », présent dans toutes les manifestations, exprime bien l’enjeu de l’éducation dans la vie des ménages ouvriers et populaires chiliens.

Les étudiants et familles portent le poids de 75% des coûts d’éducation, les frais de scolarité atteignent – même dans les universités publiques – des sommes astronomiques, jusqu’à 1 800 $ par mois, la norme étant entre 250 et 860 $ par mois.

En moyenne, chaque étudiant chilien est endetté à hauteur de 30 000 $ à la sortie de ses études, en raison des crédits contractés pour les financer.

Aujourd’hui, l’université est devenue de fait inaccessible à la plupart des enfants des classes populaires. Pour les autres ainsi que pour les enfants des classes moyennes, elle signifie des sacrifices de plus en plus insupportables pour avoir accès à une éducation de piètre qualité, notamment dans les universités privées autonomes.

Les revendications du mouvement étudiant portent donc fondamentalement sur la remise en cause de la privatisation de l’éducation héritée de l’ère Pinochet et réalisée sur la base de la municipalisation et de l’autonomie des universités.

Mais elles voient plus large, avec notamment le financement de l’éducation publique par la re-nationalisation intégrale du cuivre et une réforme progressive de la fiscalité, touchant les plus riches et les grandes entreprises.

Le mouvement étudiant porte la revendication de la remise en cause de l’ensemble du modèle capitaliste libéral chilien, comme l’affirme la secrétaire communiste de la Fédération étudiante de l’Université du Chili (FECH) Camila Vallejo : « ce modèle néo-libéral ne nous convient pas. Son seul but est le profit et les intérêts d’une minorité.

Nous estimons qu’il est nécessaire d’avancer vers un système plus égalitaire. Nous voulons un pays libre, un pays juste, plus démocratique et plus égalitaire. Et c’est pour cela que nous avons besoin d’une éducation de qualité pour tous. »

Face à ces revendications légitimes, le gouvernement réactionnaire de Pinera est de plus en plus affaibli politiquement. Ces manœuvres politiciennes visant à minimiser ou décrédibiliser le mouvement ne prennent pas auprès d’un peuple chilien qui soutient à plus de 80% les revendications des étudiants.

Le dernier recours est l’usage de la force. Ces 24 et 25 août, les forces de police ont usé d’une violence sans retenue envers les manifestants, aboutissant à l’arrestation de 1 394 manifestants.

Surtout, ce déchaînement de violence a conduit au décès d’un jeune lycéen de 16 ans, Manuel Gutiérrez Reinoso, abattu d’une balle en pleine poitrine et qui, d’après les premiers témoins, ne faisait que suivre la manifestation à deux pas de son domicile.

Comme le résume bien le président de la Commission chilienne des droits de l’Homme, Gonzalo Taborga : « On vit aujourd’hui au Chili sous un État policier qui ne reconnaît pas le droit à manifester ».

La vague d’indignation causé par la mort du jeune Manuel Gutiérrez a conduit le gouvernement à afficher publiquement sa volonté d’ouvrir les négociations.

Rien n’indique qu’il bougera de la position initiale du GANE (Grand accord national pour l’éducation), c’est-à-dire des mesures purement cosmétiques – comme une revalorisation des bourses et une baisse des taux d’intérêts – ne touchant pas à la question de la privatisation de l’éducation.

En tout cas, la colère sociale portée par le mouvement fait qu’au Chili plus rien ne sera vraiment comme avant, elle porte en elle la remise en cause de l’ensemble du modèle capitaliste chilien, héritier de la dictature, poursuivi et approfondi par la gauche de la « Concertation » (démocrate-chrétienne/socialiste soutenue par les communistes) et par la droite de Pinera.

Comme le résume le secrétaire-général du PC Chilien, Guillermo Tellier, la volonté d’en finir avec ce système est telle chez les manifestants, étudiants et travailleurs que le prochain gouvernement ne pourra « ni être un gouvernement de droite, ni être un gouvernement de la Concertation » mais un mouvement politique et social qui incarne une réelle alternative, remettant en cause le règne du profit dans la vie politique et dans la société Chilienne.

Article AC pour http://solidarite-internationale-pc...