Parti Communiste Français Section de Saint-Martin d’Hères
Accueil du site > Solidarité internationale > Elections en République tchèque : le Parti communiste passe de 11 à 15 %, son (...)

Elections en République tchèque : le Parti communiste passe de 11 à 15 %, son deuxième meilleur score depuis 1989

octobre 2013, par Saint Martin d’Hères

Article AC pour http://solidarite-internationale-pc...

Elections législatives anticipées en République tchèque les 25 et 26 octobre 2013, trois mois après la démission du gouvernement plongé dans une vaste affaire de corruption. Malgré les diversions de formations populistes, les communistes sortent en position de force.

Médias contrôlés par les magnats de la presse, partis du consensus dominant, artistes peu inspirés : ces dernières semaines ont été marquées par une intense propagande contre le « péril rouge », l’ascension attendue des communistes et leur retour potentiel au pouvoir.

Effritement des partis traditionnels et émergence de nouveaux partis populistes … financés par des milliardaires

Le premier enseignement prévisible, c’est que les partis de droite au pouvoir depuis 2010 ressortent laminés. Discrédités car mouillés dans le plus grand scandale de corruption de l’histoire du pays et artisans de la politique dite de rigueur.

Le parti historique de droite, celui de Vaclav Havel, l’ODS subit une déroute historique, passant de 20 % à 7 %, avec à peine 16 sièges. L’ex-nouveau parti libéral et affairiste, « TOP 09 », du prince Karl Schwarzenberg, passe lui de 17 à 12 %.

Second enseignement, l’autre pilier du système, le parti social-démocrate (CSSD) pourtant dans l’opposition, réalise un score très décevant : 20,5% des voix et 50 sièges, en baisse par rapport à 2010 alors que les sondages l’annonçaient entre 25 et 30%.

Troisième enseignant, comme ailleurs en Europe quand les partis traditionnels du système s’effritent ou s’effondrent sous l’effet des politiques d’austérité, des scandales, les nouveaux mouvements mêlant populisme anti-partis et programme ultra-libéral, percent.

L’ « Aube de la démocratie directe » du milliardaire nippono-tchèque Tomio Okamura, avec 6,7 % et surtout « ANO » (« Action des citoyens mécontents » mais aussi « Oui » en tchèque) d’Andrej Babis, qui obtient 18,7% des voix et 47 sièges.

Babis, qui a fait fortune dans l’agro-alimentaire est aujourd’hui à la tête d’un empire financier qui en fait le second homme le plus riche du pays.

A la tête de deux journaux nationaux (Mlada fronta dnes, Lidove Noviny), et surtout du gratuit Metro lu par un million de Tchèques, Babis a axé sa campagne sur le rejet de la « classe politique » traditionnelle, un populisme anti-élitiste couplé à un programme libéral.

Babis suit le modèle de plus en plus diffusé en Europe, celui d’abord de Berlusconi, suivi désormais par Franz Stronach en Autriche ou Bidzina Ivanishvili en Géorgie – l’image du self-made man milliardaire prêt à gérer son pays efficacement, comme une entreprise.

Le Parti communiste à 15 %, au plus haut depuis dix ans

Dernier et peut-être principal enseignement de cette élection, c’est le très bon résultat attendu du Parti communiste de Bohême-Moravie qui passe de 11,2 % en 2010 à 14,9 %, gagnant 100 000 voix et 6 sièges, avec 33 sièges au Parlement.

Il s’agit de meilleur score depuis 2002 à une élection nationale, et son deuxième meilleur score depuis la contre-révolution de 1989.

La répartition géographique des votes ne réserve guère de surprise. Sauf dans la région-capitale Prague, le Parti dépasse partout les 10% et fait le plein dans leurs bastions.

De très bons scores à l’est en Moravie et en Silésie (17% à Olomouc, 17,5% en Moravie du nord) ainsi qu’au nord-ouest dans les Sudètes (16,4% en Bohême du sud, 15,7% à Plzen, 16,8 % à Vysocina et évidemment 20,3 % à Usti nad Labem).

Après le succès aux élections régionales d’octobre 2012, qui avaient vu les communistes prendre la seconde place, talonner les sociaux-démocrates et gagner même la direction d’une région (Usti nad Labem), c’est une preuve de plus de la montée du KSCM. 

Une preuve de la reconnaissance placée par le peuple tchèque dans le programme du parti axé sur la défense et la reconquête des services publics, la défense du système de retraites solidaire, une réforme fiscale progressive touchant les riches et les entreprises.

Un casse-tête pour la classe dominante tchèque : coalition introuvable, pays ingouvernable ?

Toutefois, pour la classe politique tchèque, la percée du Parti communiste couplé au résultat décevant des sociaux-démocrates, l’effondrement de la droite traditionnelle risquent de se transformer en casse-tête. Avant les élections, deux options étaient ouvertes.

La première, qui effrayait la droite réactionnaire, est de plus en plus improbable. Un gouvernement mené par les sociaux-démocrates, soutenu par les communistes. Avec 83 sièges sur 200, ce gouvernement serait de fait minoritaire.

Aucun des autres partis tchèques n’accepteraient de près ou de loin de s’allier au KSCM, sans oublier de lourds désaccords fondamentaux entre communistes et sociaux-démocrates notamment sur la politique internationale, une telle option est désormais exclue.

La seconde, c’est celle d’une « grande coalition », qui paraît plus crédible. Moins peut-être avec l’OSD rabougri qu’avec certaines nouvelles formations populistes, sans doute les chrétiens-démocrates, inévitablement l’ANO avec ses 47 sièges.

Dans l’esprit de son message populiste ambigu et opportuniste, l’ « ANO » a d’abord insisté sur son refus de participer à un gouvernement de gauche … avant de se déclarer ouvert au dialogue, l’occasion sans doute de grappiller des postes, ou d’obtenir des réformes libérales.

Enfin, la troisième, qui paraît inéluctable à court ou moyen-terme, ce sont de nouvelles élections. Car en réalité, l’Assemblée après le scrutin est encore plus balkanisée qu’avant.

Une seule certitude, le Parti communiste en sortira plus fort pour défendre les intérêts des travailleurs du pays, contre l’austérité d’où qu’elle vienne.